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des  armées  faisait  le  silence  sur  l'action  héroïque  du  peuple
             français.  Les  communiqués  militaires  des  F.T.P.  non  négli-
             geables  en  1941-42,  si  importants  en  1943,  c'est  vainement
             qu'on  en  chercherait  trace  dans  les  archives  des  émissions.
             Ils  étaient  pourtant  régulièrement  transmis  à  Londres.  Mais,
             là-bas,  un  cercle  de  techniciens  et  de  politiciens  estimait  qu'il
             valait  mieux  « éviter  le  combat ».  Ils  nous  prêchaient  la  pa-
             tience,  cherchant à  endormir notre ardeur frémissante  en  nous
             donnant  des  conseils  puérils:  « Notez  les  numéros  des  ré-
             giments allemands stationnés autour de vous;  mesurez  la pro-
             fondeur  des  rivières  de  votre  région ...  »
                Après  le  premier  débarquement,  le  général  Kœnig  en-
             voyait  ce  message:  « Freinez,  je  dis  freinez,  guerilla ! »
                On  avait  beau  montrer  à  ces  prétendus  spécialistes  des
             E.M.  les  succès  de  notre  tactique  de  guerilla,  ils  trouvaient
             que  sabotages  et  attaques  à  main  armée  étaient  trop  dange-
             reux  pour  leurs  auteurs.  Et  ils  préféraient  à  un  sabotage  in-
             telligent,  qui  paralyse  une  usine  en  détruisant  une  pièce
             essentielle,  un  vaste  bombardement  qui,  en  rasant  l'usine  et
             les  quartiers  voisins,  diminuait  notre  potentiel  industriel  à
             venir  et,  en  démoralisant  la  population,  la  détournait  de
             l'action  contre  les  Allemands.
                Oubliera-t-on  que  Marseille  subit  un  stupide  bombarde-
             ment,  et  combien  meurtrier,  le  lendemain  même  du  jour  où
             la  grève  générale  y  avait  éclaté  (27  mai  1944) ?
                Jamais  le  B.C.R.A.,  Etat-Major  particulier  du  général  de
             Gaulle,  qui  se  transforma  en  D.G.E.R.  après  la  libération,
             ne  consentit  à  faire  parachuter des  armes  pour  ceux  qui  vou-
             laient se  battre, et, en  premier  lieu,  pour  les  F.T.P.  Les  armes
             que  nous  avons  reçues  en  Haute-Savoie,  c'est  en  trompant
             Londres  sur  leur  destinataire  que  nous  les  avons  eues.  Ont
             été  munis  d'armes,  en  général,  ceux  qui  promettaient  de  ne
             pas s'en  servir et  d'attendre  sagement  un  fabuleux  « jour  J ».
             Combien  de  «maquis»  massacrés  à  côté  de  dépôts  d'armes
             auxquels  il  leur  était  interdit  de  toucher !  Combien  de  ces
             dépôts  tombèrent  aux  mains  de  l'ennemi !  Les  G.M.R.  et  les
             miliciens  étaient  finalement  tous  équipés  d'armes  anglaises !

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