Page 293 - Les merveilles de l'industrie T3 Web
P. 293

INDUSTRIE DE L’EAU.                                 291

       bution de l’eau de la Vanne seront termi­  rente de 35 livres 10 sous, pour une dériva­
       nés, chaque habitant de Paris aura à sa   tion de la fontaine Barre-du-Bec. Cet exem­
       disposition 227 litres d’eau par 24 heures.  ple fut imité, et, depuis, un assez grand
         L’abus des concessions particulières gra­  nombre de concessions d’eau furent acquises
       tuites rendait encore plus précaire le ser­  à prix d’argent.
       vice des eaux. Toute riche abbaye, tout per­  En 1608, nouvelle pénurie d’eau, nou­
       sonnage puissant, se faisait accorder une   velle réduction des concessions. Leroi lui-
       concession d’eau. On la demandait, pour la   même se soumet à la réduction.
       forme, au bureau de la ville, qui avait tou­  Pour remédier en partie au manque
       jours la main forcée.                     d’eau qui excitait les plaintes du peuple,
         Lorsque la disette d’eau était par trop   Henri IV voulut rendre à la distribution de
       grande, quand les fontaines publiques     la ville le volume d’eau que recevaient à
       étaient taries, le prévôt des marchands ren­  cette époque les maisons royales. 11 fit étu­
       dait une ordonnance, qui prescrivait à tous   dier et approuva, en 1606, le projet de la
       les concessionnaires de présenter leurs ti­  pompe de la Samaritaine, qui lui fut pré­
       tres. Mais le public n’y gagnait rien. On ne   senté par un Flamand, nommé Jean Lim-
       manquait jamais, en effet, après une exécu­  laer. Cette pompe devait élever l’eau de la
       tion de ce genre, de demander et d’obtenir   Seine dans un réservoir placé au-dessus du
       de nouvelles concessions, qui rétablissaient   Pont-Neuf, pour la distribuer au Louvre et
       les choses dans l’état primitif. Les grands   aux Tuileries. Cet établissement hydrauli­
       seigneurs, les riches abbayes détournaient à   que fut érigé en 1608, malgré l’opposition
       leur profit les minces filets d’eau rassem­  du prévôt et des échevins. L’eau élevée
       blés à grand’peine par le prévôt des mar­  fut substituée à celle qu’on tirait de la fon­
       chands.                                   taine de la Croix-du-Trahoir (I).
         Ce n’est qu’à ce résultat négatif qu’abouti­  La pompe delà Samaritaine amenait l’eau
       rent l’édit de Charles VI, du 9 octobre 1392,   dans une espèce de château d’eau situé sur
       l’ordonnance du bureau des eaux, du 28 no­  le Pont-Neuf, et qui était construit dans un
       vembre 1553, et l’ordonnance du prévôt des   style tout architectural par ses dimensions
       marchands de 1587.                        et ses proportions élégantes. La figure 136
         Henri IV fut le premier qui sut faire   (page 293) représente la Samaritaine du
       respecter ses édits. Dès son entrée dans Pa­  Pont-Neuf au temps de Henri IV.
       ris, il ôta au prévôt des marchands et aux   Henri IV se disposait à faire conduire à
       échevins la faculté de disposer de l’eau des   Paris, pour l’usage des habitants, les eaux
       fontaines publiques. On fit la révision des   de la source d’Arcueil, lorsque la mort le
       titres des concessionnaires, et, au mois de   surprit. Mais ce projet, comme on va le voir,
       mai 1598, le nombre des concessions se    fut réalisé par Marie de Médicis.
       trouva réduit à 14. Henri IV fit détruire les   Cette époque est remarquable à deux
       conduites qui amenaient l’eau dans les ha­  points de vue. Pour la première fois, on
       bitations des grands seigneurs et des parti­  faisait usage des machines hydrauliques
       culiers. 11 se réserva de disposer de ces   pour élever l’eau du fleuve, et l’on adoptait
       eaux, et n’usa de ce droit que pour assurer   un nouveau mode de distribution, en ven­
       eu peuple leur usage exclusif.            dant des concessions d’eau. Jusqu’alors, si
         La première concession payante fut ac­  l’on fait abstraction des privilégiés qui la re-
       cordée en 1598, au prévôt des marchands,
                                                   (I) Mémoires de l’Académie des inscriptions, t. XXX,
       Martin Langlois, qui paya à la ville une   p. 743.
   288   289   290   291   292   293   294   295   296   297   298