Page 220 - La Lecture Expressive
P. 220
214
Lecture 106. Abeille <conte>
III. Les Ondines du Lac (fin).
1. Abeille, étendue, les mains jointes, sur son lit de mousse, vit
des étoiles s'allumer en tremblant dans le ciel pâle, puis ses yeux
se fermèrent à demi ; pourtant il lui sembla voir en l'air un petit
1
Nain monté sur un corbeau. Ce n'était point une illusion • Ayant
tiré les rênes que mordait l'oiseau noir, le Nain s'arrêta au-dessus
de la jeune fille et fixa sur elle ses yeux ronds ; puis il piqua des
2
deux et partit au grand vol. Abeille vit confusément ces choœs
et s'endormit.
2. Elle dormait quand Georges revint avec sa cueillette, qu'il
déposa près d'elle. Il descendit au bord du lac en attendant qu'elle
se réveillât. Le lac dormait sous sa délicate couronne de feuillage.
Une vapeur légère traînait mollement sur les eaux. Tout à coup,
la lune se montra entre les branches ; aussitôt les ondes furent
jonchées d'étincelles.
3. Georges vit bien que ces lueurs qui éclairaient les eaux n'étaient
pas toutes le reflet brisé de la lune, car il remarqua des flammes
bleues qui s'avançaient en tournoyant avec des ondulations et
3
des balancements, comme si elles dansaient des rondes. Il reconnut
bientôt que ces flammes tremblaient sur des fronts blancs, sur des
fronts de femmes., En peu de temps, de belles têtes couronnées
d'algues et de pétoncles , des épaules sur lesquelles se répan-
5
4
daient des chevelures vertes, des poitrines brillantes de perles, et
d'où glissaient des voiles, s'élevèrent au-dessus des vagues. L'enfant
reconnut les Ondines et voulut fuir. Mais déjà des bras pâles et
froids l'avaient saisi, et il était emporté, malgré ses efforts et ses cris,
6
à travers les eaux, dans des galeries de cristal et de porphyre •
4. La lune s'était élevée au-dessus du lac, et les eaux ne reflé-
7
taient p'ius que le disque émietté de l'astre. Abeille dormait encore.
Le Nain qui l'avait observé revint vers elle sur son corbeau. II
était suivi cette fois d'une troupe de petits hommes. Une barbe