Page 218 - La Lecture Expressive
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          1  Lecture             105.  Abeille  (coute)



                          Il. Les  Ondines  du  Lac  (sutteJ.
            1.  Les  deux petits aventureux trouverent dans le  fourre  un sen-
          tier  étroit.  On  y  voyait seulement  le  creux  laissé  par  une  infinité
          de  petits pieds  fourchus.
            « Ce  sont  des  pieds  de  diablotins,  dit Abeille.
            -  Ou  de  biches,  » dit  Georges.
            La  chose  n'a  point  été  éclaircie.  Mais,  ce  qu'il  y  a  de  certain,
          c'est  que  le  sentier  descendait  en  pente  douce  jusqu'au  bord  du
          lac,  qui  apparut  aux  deux  enfants  dans  sa  languissante  et silen-
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          cieuse  beauté.  Des  saules  arrondissaient  sur  les  bords  leur  feuil-
          lage  tendre.  Des  roseaux  balançaient  sur  les  eaux  leurs  glaives  2
          souples  et  leurs  délicats  panaches ;  ils  formaient  des  îles  frisson-
          nantes,  autour  desquelles  les  nénuphars  étalaient  leurs grandes
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          feuilles en cœur et leurs fleurs à la chair blanche. Sur ces îles fleuries,
          les  demoiselles 4,  au  corsage  d'émeraude  ou  de  saphir  et aux ailes
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          de  flamme,  traçaient  d'un  vol  strident  des  courbes  brusquement
          brisées.
            2.  Abeille  s'avança  sur  le  sable  entre  deux  bouquets  de  saules,
          et, devant elle,  le  petit Génie  du  lieu  sauta dans l'eau en laissant à
          la  surface  des  cercles  qui  s'agrandirent  et s'effacèrent.  Ce  Génie
          était une  petite  grenouille  verte  au  ventre  blanc.  Tout se  taisait ;
          un souffie  frais  passait sur ce  lac  clair,  dont chaque  lame  avait le
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          pli  gracieux  d'un sourire.
            3.  « Ce  lac  est  joli,  dit  Abeille  ;  mais  mes  pieds  saignent  dans
          mes  petits  souliers  déchirés,  et  j'ai grand  faim.  Je  voudrais  bien
          être dans le  château.
            -  Petite  sœur,  dit  Georges,  assieds-toi  sur  l'herbe.  Je  vais,
          pour  les  rafraîchir,  envelopper  tes  pieds  dans  des  feuilles,  puis
          j'irai te chercher à souper. J'ai vu là-haut, proche de  la  route,  des
          ronces  toutes  noires  de  mûres.  Je  t'apporterai  dans  mon  chapeau
          les  plus  belles  et Jes  plus  sucrées.  Donne-moi  ton  mouchoir :  j'y
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