Page 226 - Histoire de France essentielle
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Lectures. — 218 — PÉRIODE CONTEMPORAINE.
sacrés ou faits prisonniers : les
survivants se réfugièrent dans
la petite mosquée ou marabout
de Sidi-Brahim. Le capitaine Gé-
reaux les commandait. Il savait
qu’il ne pouvait compter sur
aucun secours : des milliers d’en
nemis tournaient autour de sa
petite forteresse en poussant des
hurlements sauvages. Il résolut
de faire son devoir et de lutter
jusqu’à la mort. Les portes du
marabout furent barricadées et
les Français ouvrirent le feu par
les autres ouvertures.Ils visaient
lentement, sans se presser, avec
le calme de braves gens qui ont
fait le sacrifice de leur vie. Plus
d’un Arabe pnordit la poussière
ce jour-là.
Abd-el-Kader connaissait les
Français et savait de quoi ils sont
capables. Puisque la force ne
réussissait pas, il voulut em
ployer la ruse. Il fit venir un des prisonniers, le capitaine Duterlre.
« On va suspendre le feu, lui dit-il. Présente-toi devant le marabout,
engage tes compatriotes à se rendre. S’ils capitulent, tu auras la vie
sauve ; s’ils refusent, tu es mort. »
Dutertre n’était qu’un simple officier de l’armée d’Afrique. Mais
c’était un héros dont tous les Français devraient connaître le nom. Il
s’avança d’un pas ferme vers le marabout : les Français en l’apercevant
pâle, les vêtements déchirés, sans armes, cessèrent de tirer. Arrivé
près de la porte, il fit signe qu'il voulait parler; tous l’écoutèrent en
silence : « Soldais, dit-il d’une voix forte, on va me décapiter si vous
rejusez de poser les armes. Je n’ai qu’un conseil à vous donner. Mourez
tous jusqu’au dernier plutôt que de vous rendre. »
Il avait à peine fini que, sur un signe de l’émir, un Arabe lui coupa
la tète d’un coup de sabre. Exaltés par tant d’héroïsme, les Français
se battirent pendant trois jours, sans eau et sans vivres, contre leurs
féroces ennemis. Quand ils virent que leurs forces s’affaiblissaient, ils
sortirent du marabout et, suivis de près par les Arabes qui tourbil
lonnaient autour d’eux, ils essayèrent de gagner la ville voisine. Douze
seulement y réussirent. Le capitaine Géreaux n’était pas parmi eux.
(D'après Cm Normand.)