Page 202 - Histoire de France essentielle
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Lectures. 194 — PÉRIODE CONTEMPORAINE.
()3e Lecture. — Siège de Sara gosse.
Les Espagnols opposaient à nos soldats la plus glorieuse défense
qu’une ville assiégée ait jamais opposée à l’invasion étrangère. Aux
soldats espagnols s’étaient joints une vingtaine de mille paysans
contrebandiers et bons tireurs. Des approvisionnements en blé, vin,
bétail, avaient été amassés. Les Anglais avaient envoyé d’abondantes
munitions de guerre. Des potences avaient été élevées sur les places
publiques pour exécuter immédiatement quiconque parlerait de se
rendre. Le siège dura un an.
Lannes est nommé chef des troupes assaillantes. Il ordonne l’assaut,
général. Les canons font plusieurs brèches dans les murailles ; les
Erançais y pénètrent, mais ne peuvent aller plus loin.
De gros bâtiments, de ^vastes couvents solides, de grandes maisons
massives carrées prenant leur jour en dedans permettent de faire de
toute maison une citadelle que les Espagnols défendent jusqu’à la
dernière extrémité. Ils barricadent les portes et les ienêtres, pratiquent
des créneaux pour faire feu dans la rue, et des coupures en dedans de
façon à communiquer intérieurement. A peine les Français se mon
trent-ils qu’un effroyable feu de mousqueterie, partant de mille ou
vertures, abat ceux qui ont la témérité de se faire voir. Ils ne s’em
parent des maisons contiguës qu’en passant de l’une à l’autre par des
percements intérieurs.
Des moines dirigent les Espagnols, des femmes les excitent. Plusieurs
fourneaux de mine éclatent sous les pieds de nos soldats, et ouvrent
de vastes entonnoirs où heureusement peu de soldats périssent. Lannes
ordonne alors de cheminer avec la sape et la mine, de faire sauter en
l’air les édifices. Le feu est sur trois ou quatre points de la ville, elle
est écrasée de bombes, tout cela n’intimide pas les assiégés, ils brûlent
eux-mêmes leurs maisons pour retarder la marche des Français. Nos
soldats veulent abréger la lutte. Ils font sauter les toits des maisons
et les édifices tout entiers avec les défenseurs qui les occupent.
Nous n’avions pas moins de ioo hommes tués et blessés chaque jour
depuis que la guerre des maisons était commencée. L’épidémie enle
vait un plus grand nombre d’Espagnols. Les assiégés n’avaient plus le
temps d’enterrer leurs cadavres; on les laissait au milieu des décombres,
d’où ils répandaient une horrible infection.
Quand la ville se rendit, elle n'était plus qu’un monceau de cendres
et de ruines.
(D’après Thiers.)
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