Page 67 - Les mémoires du curé du maquis Des Glières
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DE GLIÈRES
Je suis introduit une troisième fois pour me trouver
cette fois en face de Siegel, ancien garde mobile passé au
maquis et qui sert maintenant de dénonciateur. Il commen-
ce par affirmer aux Allemands que je suis monté plusieurs
fois à Glières ... Je passe alors à l'attaque et je lui demande
assez vertement s'il m'a vu à Glières ... Il est obligé de ré-
pondre qu'il ne m'a pas vu, que ce sont des camarades qui le
lui ont dit ... Puis il dit que c'est moi qui ai donné l'ordre
de monter le tabac à Glières ... Je réponds que non et pour
les ébranler, je leur dis que je sais comme tout le monde
qu'il y a eu du tabac dans le pays et je me paye le luxe de
leur indiquer l'endroit, derrière la cure dans une maison
démolie ... On peut voir encore le trou ; mais on murmure
dans le pays que le tabac a été volé ... Heureusement ils ne
pensent même ~as à aller contrôler. .. alors qu'il en restait
encore sur la voûte de mon Eglise. Ils regrettent alors de ne
pouvoir pas me confronter avec celui qui avait monté le
tabac car il était absent ... Or Arthur Ballanfat était tou-
jours là ; mais il ne m'avait pas vendu ...
Le soir du reste, je pus me glisser a côté de lui pour
dormir et il me dit« Vous savez pour le tabac, je n'ai rien
dit mais je suis perdu, Siegel a affirmé que je montais tous
les jours». Je l'encourageais de mon mieux et lui donnais
l' Absolution. Hélas ce brave Arthur devait être fusillé le
samedi 1er avril à La Lovatière avec Gérard Pessey et
César Sonnerat. .. Il avait eu le courage de ne pas vendre son
Curé ...
Malgré mes protestations je ne suis plus interrogé, ni
relâché... Mais je suis emmené le vendredi après-midi à
Annecy où le Commandant de la Gestapo me déclare que
j'ai besoin de corriger. .. Je n'en sus pas plus long ... On
m'enferma à la Prison Saint-François d'où on me dirigea
le 17 avril sur Compiègne et le 3 juin sur Neuengamme et
enfin Dachau ...