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INDUSTRIE DE L’EAU.                                227


          je Walchner. Il opéra sur les eaux de     ques noms à la liste de ces agents méconnus jus
                                                    qu’ici, et dont l’acide arsénieux nous aura appris à
          Passy, et conclut de ses recherches qu’il
                                                    rechercher la présence. »
          n’existe dans ces eaux minérales aucune trace
          d’arsenic.                                  Les observations postérieures ont montré
            R était nécessaire, pour vérifier le fait   l’exactitude de ces prévisions. MM. Liebig,
          annoncé par Walchner, d’agir sur les      Chatin, Chevallier, Ossian Henry et d’autres
          eaux mêmes que ce chimiste avait exa­     chimistes, ont constaté l’existence de l’ar­
          minées, c’est-à-dire sur les eaux de Vies­  senic dans une foule des eaux ferrugi­
          bade. J’entrepris cette recherche sur 500   neuses et non ferrugineuses. Quelques hy­
          grammes de résidu de l’évaporation spon­  drologistes ont prétendu même que l’arsenic
                                                    est un élément constant des eaux ferrugi­
          tanée de l’eau de Viesbade, reçu de cet
          établissement thermal. En dissolvant 100   neuses; mais MM. Chevallier et Gobley ont
                                                    démontré que ce métalloïde n’existe pas
          grammes de ce résidu dans l’acide sulfurique
          bouillant, je n’eus pas de peine à recon­  dans quelques sources de ce genre. Celles
          naître dans ce liquide, au moyen de l’appa­  de Tunbridge, en Angleterre, par exemple,
          reil de Marsh, la présence de l’arsenic   sont dans ce cas, d’après Brande.
                                                      L’existence de l’arsenic est donc très-
          J’essayai de remonter indirectement à la
          quantité de composé arsenical existant dans   fréquente dans les sources minérales ferru­
          l’eau de Viesbade, et arrivai à ce résultat   gineuses. C’est dans le sédiment abandonné
          que 100 litres de cette eau peuvent renfer­  par les eaux qu’on le trouve le plus sou­
          mer 0gr,00045 d’arsenic, à l’état d’arsénite   vent, mêlé à de l’oxyde de fer et à d’autres
                                                    principes insolubles.
          de fer.
            En communiquant ce résultat à l’Acadé­    On n’hésite pas aujourd’hui à attribuer
          mie des sciences (1), je disais, en terminant   les propriétés toniques et réconfortantes des
          mon mémoire :                             eaux ferrugineuses, tout à la fois à l’oxyde de
                                                    fer et à l’arsenic. Ce corps, dont l’action
            « Le fait de la présence de l’arsenic dans les eaux   sur l’organisme est si énergique, doit exer­
          de Viesbade ouvre une voie nouvelle à l’apprécia­  cer une influence considérable sur les effets
          tion thérapeutique de l’action des eaux minérales,
          el, par conséquent, il promet aux chimistes des ré­  curatifs des eaux minérales, bien qu’il y
          sultats très-dignes d’encourager leurs travaux. On   existe toujours en proportion minime. C’est
          connaît un grand nombre d’eaux minérales qui,   l’opinion de Thénard et de M. Lhéritier à
          chimiquement, ne diffèrent pas de l’eau des puits,
                                                    l’égard des eaux de Plombières et du Mont-
          et qui cependant produisent les effets les plus éner­
          giques de réaction générale et exercent consécuti­  Dore.
          vement sur l’économie les modifications les plus   Thénard attribue également à l’arsenic
          profondes. Ces faits singuliers, qui tous les jours
          frappent les médecins de surprise, n’ont jusqu’ici   les effets énergiques de l’eau de Bourboule.
          trouvé aucune explication plausible et ont contribué   Cette eau est la plus arsenicale que l’un
          à élever contre la valeur des indications chimiques
                                                    connaisse, puisqu’elle renferme, d’après
          appliquées aux eaux minérales, certaines défiances
           que le temps apprendra à surmonter. Quelques mé­  Thénard, 13 milligrammes d’arsenic par
           decins vont, en effet, jusqu’à faire honneur de l’ef­  litre d’eau.
           ficacité thérapeutique des eaux dont nous parlons   L’arsenic se trouve probablement, comme
           à leur thermalité particulière. 11 devient mainte­
           nant très-probable que les effets remarquables sont   je l’avais annoncé en 1847, à l’état d’arsénite
           dus à quelques substances actives à faible dose; et   ou d’arséniate ferreux dans les eaux miné­
           probablement les chimistes pourront ajouter quel-  rales ferrugineuses. L’arsénite ou l’arséniate
                                                     de fer est insoluble dans l’eau, mais il peut
            (I) Séance du 26 octobre 1846. — Voir le mémoire
           dans le Journal de pharmacie et de chimie, 1817.   être dissous par l’acide carbonique libre.
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