Page 54 - Les chemins de terre Complet
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QJ e Père Degenève fut envoyé au collège Saint-Louis, et c'est dans
                              ~  ..._,  ce quartier du Fort de Vizagapatam où il passa le reste de ses
                             jours, d'abord comme professeur au collège et, depuis  1932, comme curé
                              de la paroisse du Sacré-Coeur.


                              Excellent  musicien,  le  Père  Degenève  fut  chargé  de  la  chorale  et  de  la
                              fanfare  du  collège  ; il  eut aussi  à s'occuper des  orphelins et,  pendant de
                              longues  années,  fut  professeur de  septième.  Dans  le  système  anglais,  la
                              septième est une classe très importante. Le Père Degenève sut y tenir, sous
                              la  bride  d'une  main  ferme,  toute  une  génération  d'élèves  peu  faciles  à
                              mener, et qui disent encore volontiers: La 5ème (Père Dématraz), c'était le
                              paradis,  la 6ème (Père Cowman) c'était le  purgatoire,  et  la 7ème, c'était
                              l'enfer ! ".
                              Cependant, le Père aimait réellement ses élèves et ceux-ci le savaient. Des
                              lettres,  arrivées  après  sa  mort,  prouvent  combien  ses  anciens  élèves
                              restèrent attachés à lui.


                              Les catholiques du Fort n'avaient alors pas d'église à eux ; ils allaient à la
                              chapelle du collège et le directeur du collège faisait aussi fonction de curé
                              du  Fort.  Tous  les  Pères  du  collège  s'aidaient  à  assurer  les  services
                              paroissiaux, mais ce fut bientôt le Père Degenève, toujours très actif, qui en
                              eut la plus grande part. Quand la paroisse eut son église, qui fut bénite en
                              1932,  le  Père  Degenève  devint  alors  curé  de  la  paroisse  et  quitta
                              définitivement  le  collège.  N'étant  plus  professeur,  il  se  donna
                             complètement à ses Anglo-Indiens qu'il connaissait tous, et qui lui étaient
                              aussi attachés et dévoués qu'il l'était à eux. En lui,  ils perdent réellement
                              un père aimant et prêt à tous les sacrifices pour ses enfants.

                             Comme  Mgr  Rossillon,  le  Pêre  Degenève  goûtait  la  littérature,  en
                              particulier Léon Daudet; il aimait lire et savait écrire. Son talent de causeur
                             excellait  dans  les  petites  histoires;  les  lecteurs  du  Missionnaire  Indien
                              savent avec quel prix il savait les raconter.

                             Le Père Degenève était le seul survivant del"' équipe 1894 " qui donna à
                              Vizag tant de saints prêtres et de bons missionnaires. Avec lui, disparaissent
                              bien des souvenirs.  Nos anciens ont tracé un profond sillon dans le sol de
                             l'Inde;  notre  tâche  à  nous  sera  d'imiter  leur  exemple  de  travail,  de  vie
                             intérieure,  de constance dans l'effort.  Notre sillon à  nous  sera sans doute
                             différent du leur sous bien des rapports.












                                                                                         MGR BAUD,
                                                                             EVÊQUE DE  VIZAGAPATAM
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