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même. Il ne connaissait ni la prévention, ni l’esprit
de parti : il était cartésien, et n’en admirait pas moins
Newton ; il aimait les spectacles ; il donnait la préfé
rence à la comédie sur la tragédie, comme plus con
forme à la gaité de son caractère ; il regardait Molière
comme au-dessus de tout ce que l’antiquité avait de
plus parfait. Il aimait Quinault; et le jugement de
Boileau sur ce grand homme (sic), n’altéra jamais le
plaisir que le poète des grâces lui faisait éprouver.
« Sa passion pour la lecture ne se ralentit point
avec ses forces. Cinq ans avant sa mort, sa vue s’é
tant affaiblie, il se faisait lire, six heures par jour,
surtout des livres d’histoire et de voyages ; il avait
pris pour ceux-ci et pour la navigation un goût par
ticulier, quoiqu’il n’eùt jamais été navigateur par état.
Son esprit et sa gaité le rendaient l’àme et l’idole de '
ses sociétés; il se plaisait dans celle des femmes et des
jeunes gens qui, malgré son grand âge, le recherchaient
avec empressement. La vivacité de ses saillies, le ton
d’une excellente plaisanterie, la finesse de ses ré
flexions jetaient dans sa conversation un intérêt qui
lui soumettait tous les esprits, et sa douceur lui con
ciliait tous les cœurs.
« Sa mémoire surprenante, qui ne lui manqua que
par intervalles dans ses derniers jours, lui fournissait
au besoin mille anecdotes singulières et curieuses, et
des citations heureuses, toujours à propos et sans pré*
tention. Il regardait le jeu comme le fléau des sociétés
et le tombeau de la conversation ; les seuls jeux qu’il -ÿ
se permît étaient le tric-trac et les échecs. — Il était
sobre, simple, sans faste, se servant lui-même pour
avoir occasion de faire plus d’exercice. Né avec une
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