Page 40 - A-F_Frezier_homme de science
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                       même. Il ne connaissait ni la prévention, ni l’esprit
                       de parti : il était cartésien, et n’en admirait pas moins
                       Newton ; il aimait les spectacles ; il donnait la préfé­
                       rence à la comédie sur la tragédie, comme plus con­
                       forme à la gaité de son caractère ; il regardait Molière
                       comme au-dessus de tout ce que l’antiquité avait de
                       plus parfait. Il aimait Quinault; et le jugement de
                       Boileau sur ce grand homme (sic), n’altéra jamais le
                       plaisir que le poète des grâces lui faisait éprouver.
                         « Sa passion pour la lecture ne se ralentit point
                       avec ses forces. Cinq ans avant sa mort, sa vue s’é­
                       tant affaiblie, il se faisait lire, six heures par jour,
                       surtout des livres d’histoire et de voyages ; il avait
                       pris pour ceux-ci et pour la navigation un goût par­
                      ticulier, quoiqu’il n’eùt jamais été navigateur par état.
                       Son esprit et sa gaité le rendaient l’àme et l’idole de '
                      ses sociétés; il se plaisait dans celle des femmes et des
                      jeunes gens qui, malgré son grand âge, le recherchaient
                      avec empressement. La vivacité de ses saillies, le ton
                      d’une excellente plaisanterie, la finesse de ses ré­
                      flexions jetaient dans sa conversation un intérêt qui
                      lui soumettait tous les esprits, et sa douceur lui con­
                      ciliait tous les cœurs.
                         « Sa mémoire surprenante, qui ne lui manqua que
                      par intervalles dans ses derniers jours, lui fournissait
                      au besoin mille anecdotes singulières et curieuses, et
                      des citations heureuses, toujours à propos et sans pré*
                      tention. Il regardait le jeu comme le fléau des sociétés
                      et le tombeau de la conversation ; les seuls jeux qu’il -ÿ
                      se permît étaient le tric-trac et les échecs. — Il était
                      sobre, simple, sans faste, se servant lui-même pour
                      avoir occasion de faire plus d’exercice. Né avec une
                                                                     \    1’• ?


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