Page 9 - Vincent_Delavouet
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alors à 200 francs, dont il devait me servir l’intérêt
             à 5 %. _
               J’avais alors 19 ans et connaissais bien mon travail.
             Quoique d’un tempérament plutôt chétif, j’étais arrivé à
             savoir manipuler assez adroitement mes sacs de farine, con­
             duire mes mulets sans accident, et exercer la surveillance
             de nuit du moulin sans difficulté.
               Aussi, dès avant mon départ de ce premier moulin, me
             fut-il offert, par un meunier concurrent, un emploi similaire,
             aux mêmes appointements de 240 francs par an. J’acceptai.
               Les deux années où je travaillai dans ce moulin ne me
             laissent aucun souvenir bien particulier ; si ce n’est qu’en
             quittant cette place pour me présenter au service militaire,
             j’eus encore la faiblesse de laisser entre les mains de ce
             patron, et sur sa demande, mes économies se montant alors
             à 240 francs, productifs d’intérêts à 5 %.
               Ces intérêts me furent d’ailleurs payés régulièrement,
             aussi bien par l’un que par l’autre meunier, jusqu’à mon
             retour du service militaire. Ajourné pour un an par le Conseil
             de révision, comme faible de constitution, je passai cette
             année de sursis dans les chantiers d’une ligne de chemin de
             fer qui se construisait du côté de Cluses.
               C’est de là que je partis pour faire mon service militaire
             à Alger, à la fin de 1887, pour une période de deux ans.





                                  Chapitre II
                                  Alger-Paris


                                                   Octobre 1887.
               Ces deux années furent pour moi des meilleures et des
             plus douces de ma vie, surtout en comparaison de tous les
             déboires que je venais d’éprouver. Aussi ai-je gardé d’Alger
             le plus charmant souvenir. Je n’eus que six mois d’exerci­
              ces à faire, et encore bien atténués par de nombreuses per­
              missions. J’avais de bons chefs et je faisais tout mon pos­
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