Page 651 - Les merveilles de l'industrie T1
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INDUSTRIE DU SEL.                                647

            M. Brande, 3 centigrammes de chlorure de  1 Dénudées près de la mer Morte, les rives du
           sodium par litre d’eau, avec quelques traces  ! Jourdain sont, à quelques lieues du lac,
           seulement de sulfate de chaux et d’autres  ' recouvertes d’une abondante végétation.
           sels.                                        Le travail le plus important qui ait été
              L’eau de la mer Morte est très-limpide,   publié en France sur la mer Morte consi-
           mais tellement salée, qu’aucun animal,  ' dérée au point de vue géologique et chimi-
           ainsi que nous l’avons dit, ne peut y vivre. I que, est celui de M. Louis Lartet. Ce na­
              Par suite de sa grande densité, beaucoup   turaliste, fils du célèbre paléontologiste
           de corps végétaux et animaux, qui, dans    Édouard Lartet, mort en 1870, fit partie de
           d’autres mers, iraient immédiatement au    l’expédition scientifique qu’un ami éclairé
           fond, nagent à sa surface.                 des sciences, un noble esprit, trop tôt ravi
              Suivant des observations récentes, le   à la reconnaissance de ses contemporains,
           niveau de la mer Morte serait d’environ 392   M. le duc de Luynes, accomplit, en 1864,
            mètres au-dessous de celui de la mer Médi­  dans la Palestine, l'Egypte et l’Arabie.
           terranée. D’après d’autres remarques, la pro­  M. Louis Lartet a publié en 1869, sous le titre
           fondeur moyenne serait de 400 à 600 mètres,   A' Essai sur la géologie de la Palestine et des
           ce qui mettrait son fond à 1,000 mètres au-   contrées avoisinantes (1), un mémoire re­
           dessous du niveau de la Méditerranée ! Du   marquable qui traite de l’histoire natu­
           reste, le fond de la mer Morte est composé   relle de ces contrées. Ce travail avait été
           de deux bassins différents: l’un, très-pro­  précédé d’un mémoire publié dans le Bul­
           fond, au nord, et l’autre petit, au sud. Ils   letin de la Société géologique de France (2),
           sont séparés par une péninsule sablonneuse,   ayant pour titre : Recherches sur les varia­
            nommée El-Messaa.                         tions des salines de l'eau de la mer Morte,
              Les rives arides, mornes, lugubres, de   ainsi que sur l'origine probable des sels qui en­
           cette nappe d’eau lourde et salée, sont, en   trent dans sa composition.
           quelques points, couvertes de roseaux grands   Nous pensons que nos lecteurs trouveront
           comme des arbustes, mais tous ses environs   ici avec plaisir quelques extraits de ce der­
           sont dénués de végétation.                 nier travail, qui résument ce que l’on sait
              Rien de plus triste, de plus abandonné  ■ aujourd’hui de plus positif sur le grand lac
            que cet étang qu’encadrent deux montagnes   salé de la Judée.
           et qui est dépourvu de toute végétation.
            Dans cette vallée, pas un brin d’herbe, pas   « La mer Morte ou lac Asphaltite est, comme on
                                                      le sait, l’une des nappes d’eau les plus salées et les
            une plante ; dans cette eau immobile et
                                                      plus denses du globe, en même temps que sa sur­
            glauque, pas un être vivant. Sur ses rives   face se trouve être inférieure de 392 mètres au ni­
            gisent seulement quelques arbres apportés   veau des mers, ce qui fait de son bassin l’un des ac­
            par le courant du Jourdain, mais jamais un   cidents orographiques les plus remarquables de nos
                                                      continents.
            oiseau ne vient égayer de son chant cette   «Au premier aspect, l’eau de cette mer ne paraît
            morne solitude.                           pas différer de celle de l’Océan; mais, si l’on y
              Les Arabes disent : « Celui qui tient à la   plonge la main, elle laisse une impression huileuse
                                                      assez prononcée, et à la suite d’un contact prolongé
            vie ne doit pas s’aventurer sur la mer Sa­
                                                      elle peut déterminer sur la peau la formation de
            lée. »                                    pustules qui persistent pendant tout le temps que
              Disons pourtant que la tristesse et la dé­  l’on séjourne sur le lac.
                                                        «En raison de sa grande densité (1162 à la surface,
            solation qui caractérisent la mer Morte, ne
            dépassent guère son périmètre. La stérilité
                                                     ;   (1) In-8. Paris, 1869.
            n’atteint pas tout le paysage environnant.   (2) série (Séance du 8 juin 1866).
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