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                    tasse. Qu’ils soient formés avec des graisses   ne doit plus y avoir de grumeaux. Dès qu’on
                    ou avec des huiles, ils restent toujours mous   en est à ce point, il ne reste plus qu’à donner
                    et pâteux. Dans le commerce, on les connaît   à la matière la cuisson convenable. Le sa­
                    également sous le nom de savons noirs ou   vonnier juge du degré de cuisson à l’épais­
                    de savons verts.                          sissement, à la couleur, et au temps que le
                      La cause de la différence qui existe entre   savon met à se figer.
                    les savons à base de soude et ceux à base    Le savon mou le plus recherché est d’un
                    de potasse, c’est leur mode respectif de   brun tirant sur le noir.
                    combinaison avec l’eau.                      Cette couleur est, d’ailleurs, tout artifi­
                                                              cielle. Les savonniers de la Flandre, où
                      « Les premiers, dit M. Dumas, dans son Traité de
                    Chimie absorbent une grande quantité d’eau, et la   s’exerce surtout cette industrie, avant de
                    solidifient ; les autres s’unissent aussi avec une plus   terminer la cuisson, colorent le savon, en
                    grande quantité d’eau, mais restent mous : cette   jetant dans la chaudière 500 grammes de sul­
                    moindre cohésion les rend beaucoup plus solubles,   fate de fer, 250 grammes de noix de galle,
                    aussi est-il impossible de les séparer de la lessive, et
                    l’opération du relargage ne peut-elle être pratiquée,   et 250 grammes de bois de campêche, qu’on
                    à moins qu’on n’emploie pour cela des lessives très-   a fait bouillir avec de la lessive. Or le sul­
                    salées. Mais dans ce cas, il S’effectuerait une double   fate de fer, le bois de campêche et la noix
                    décomposition; la soude remplacerait la potasse, et
                    les savons en seraient durcis. »           de galle produisent, par leur mélange,
                                                               un précipité noir qui n’est autre chose que
                      Nous décrirons en peu de mots la fabri­  l’encre. Le savon noir de Flandre est donc
                    cation des savons mous.                    coloré réellement par de l’encre.
                      Les huiles généralement employées dans     Lorsque le savon est fait avec de Y huile
                    la fabrication du savon mou, sont celles que  jaune, on lui donne une couleur verte en
                    l’on extrait des graines oléagineuses.     versant dans la lessive une dissolution d’in­
                      Les chaudières sont composées de plaques   digo.
                    de fer battu, rivées les unes aux autres.    Ce savon reste toujours à l’état de pâte
                      On commence par mettre dans la chau­     molle, ce qui force le fabricant de l’expédier
                    dière la moitié de l’huile qu’on destine à   | dans des tonneaux.
                    une cuite. On allume le feu, et lorsque l’huile   D’après tout ce qui vient d’être dit, on voit
                    commence à être chaude, on y mêle de la    que le savon mou est préparé sans relargage
                    lessive. On porte à l’ébullition, et peu à peu   ni épinage. L’huile et la lessive forment un
                    on ajoute le reste de l’huile et de la lessive.  tout, qui prend une consistance convenable,
                      Si l’on commence par employer trop de    si l’on a soin de saturer la pâte de la quan­
                    lessive, la liaison ne se fait pas; si les les­  tité d’alcali strictement nécessaire pour
                    sives sont trop fortes, le mélange se résout   opérer la complète saponification de l’huile.
                    en grumeaux ; si elles sont trop faibles, la   Selon M. Dumas :
                    liaison reste imparfaite.                    200 parties d’huile exigent pour leur sa­
                      La quantité de lessive qu’on emploie dans   ponification :
                    une cuite est dans le rapport de huit à      72 de potasse d’Amérique en lessive
                    cinq par rapport à celle de l’huile :     marquant 15° à l’aréomètre.
                      200 parties d’huile et 125 de potasse      Et l’on obtient environ 400 parties de sa­
                    fournissent 325 parties de savon mou.     von bien cuit.
                      Lorsque la liaison est bien faite, et que   D’après le docteur Ure, 200 parties d’huile
                    les grands bouillons de liquide sont passés,   peuvent donner 460 parties de bon savon, en
                    la matière doit s’éclaircir, c’est-à-dire qu’il  ' moyenne. Au reste, les savons verts ou noirs*
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