Page 446 - Les merveilles de l'industrie T1
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Ü2                     MERVEILLES DE L’INDUSTRIE.


                     Comme l’acide oléique distillé est à meil­  suifs fondus, qui sont souvent des mélanges
                   leur marché que celui qui provient de la sa­  de bons suifs avec des suifs communs qu’on
                   ponification calcaire, il donne une assez   a blanchis par des procédés chimiques, et
                   grande économie pour la fabrication des sa­  notamment par des acides. Il faut ajouter que
                   vons; mais les savons qui en proviennent   les suifs ainsi mélangés donnent à la sapo­
                   sont durs, et conservent l’odeur empyreu-   nification des résultats beaucoup moins
                   matique dont sont exempts les savons fabri­  avantageux que les suifs purs.
                   qués avec l’acide oléique non distillé.     Le suif de bœuf est ordinairement d’un
                                                             blanc jaunâtre, et il donne, lorsqu’on le
                                                             traite parles lessives de soude, un savon très-
                                 SAVON DE SUIF.
                                                             blanc et très-ferme. Le suif de mouton est
                     Tout le monde sait qu’on entend par    I plus compacte, plus blanc et moins odorant
                   suif la graisse des bêtes à cornes, c’est-à-   que le suif de bœuf, et il donne également
                   dire du bœuf, du mouton et de la chèvre.   un savon très-dur, même trop dur, ce qui
                   Ces corps gras chargés de beaucoup de     force à le mélanger, pendant la saponifica­
                   stéarine, servent à préparer des savons très-   tion, avec une petite quantité d’axonge ou
                   solides, mais dont l’odeur est presque tou­  d’huile de coco.
                   jours désagréable. On a cherché à remédier   On retire encore du suif des tripes et des
                   à cet inconvénient par divers procédés. On   abatis des boyauderies où sont traités les
                   a trouvé, par exemple, qu’une dissolution   intestins des bœufs, des moutons et des che­
                   d’alun ajoutée à du suif liquéfié à une douce   vaux. Enfin des quantités assez considéra­
                   chaleur, le purifie en précipitant une por­  bles de suif sont extraites des os. Tant il est
                   tion des substances étrangères avec les­  vrai que l’industrie s’attache à tout recueillir,
                   quelles il est toujours mêlé. L’alun contribue   à ne laisser rien perdre de ce qui peut offrir
                  •en même temps à rendre le suif plus solide.  quelque valeur marchande ! Pour ne parler
                     Le suif de mouton est le plus recherché.  que des boyauderies, nous rappellerons que
                     On distingue les suifs en suif en branches   les intestins des animaux, après avoir servi
                  et en suif fondu. Les fabricants de savon se   à faire les enveloppes des saucissons, des
                   gardent bien d’employer le premier, qui   cordes de violon, etc., laissent des résidus
                  contient presque toujours des débris de    graisseux. Ces résidus sont transformés en
                   membrtmes ; car ces matières albuminoïdes   suif, qui trouve son emploi dans les savon­
                  sont dissoutes par les lessives caustiques, qui   neries.
                  en acquièrent souvent une odeur assez in­    Les suifs, à eux seuls, ne donnent pas de
                  fecte pour qu’on ne puisse plus les employer.   lions savons ; mais, comme nous le verrons,
                  Telle est, du moins, l'opinion émise par •  ils conviennent parfaitement pour opé­
                  Pontet dans son Traité des savons.         rer des mélanges, et alors ils permettent de
                     Dans le Manuel des savonniers, ouvrage   diminuer le prix des produits obtenus.
                  plus récent, M. Lormé dit, au contraire, que   Le suif de Paris se vend en pains de
                  le fabricant de savon devrait toujours em­  20 à 30 kilogrammes. Les suifs d’Irlande,
                  ployer le suif en branches, c’est-à-dire tel   d’Allemagne et de Russie s’expédient gé­
                  qu'on le retire du corps de l’animal, parce ;  néralement en boucauts, de la contenance
                  qu’on peut alors juger de sa nature et de sa   de 500 à 600 kilogrammes ; celui d’Irlande
                  qualité, et que le fabricant serait certain   est en réputation. Le suif de Russie est sou­
                  d’avoir ainsi du suif exempt d’altération ;   vent à meilleur marché, parce que les chan­
                  tandis qu’il n’en est pas de même pour les  deliers l’emploient rarement ; ils prétendent
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