Page 62 - Album_des_jeunes_1960
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Une famille d’Hommes-Obus
par John Kobler
e jour de vos vingt et un ans sera évidemment tenant l’obus humain qui s’avance. Il est vêtu d’une
L un grand jour, mais si vous vous appeliez éblouissante combinaison blanche et porte un casque
Zacchini ce serait encore bien plus sensationnel, car de cuir et un masque d’amiante. Il monte d’abord sur
ce jour-là vous serviriez de projectile à un canon ! un plateau placé à côté de l’affût et s’asperge de talc,
Les Zacchini sont une courageuse famille, des gens ce qui lui permettra de mieux glisser hors du tube.
du cirque qui portent fièrement leur titre d’hommes- Puis, saluant la foule de la main, il monte quelques
obus. Leur canon est une monstrueuse machine, ruti marches jusqu’à la bouche du canon dans lequel il
lante, équipée d’un tube de 7 mètres de long, et quand se laisse glisser, les pieds les premiers. Petit à petit, il
elle pénètre dans l’arène du cirque il se fait brusque disparaît tout entier. Le canonnier manœuvre des
ment un grand silence. Les spectateurs savent qu’ils volants et oriente l’énorme tube pour l’amener à
vont assister à une performance si audacieuse qu’ils l’angle voulu.
ne pourront jamais l’oublier. — Sei Pronto ? (Es-tu prêt ?) crie-t-il.
Une sonnerie de cuivres retentit enfin. En boitil — Pronto (Je suis prêt), réplique une voix assour
lant, un vétéran de la famille Zacchini traverse la die qui semble monter des profondeurs de la terre.
piste et s’approche de l’engin. Il s’est fracturé trop d’os Le canonnier presse un bouton.
pour servir encore de projectile, mais il connaît tous Une formidable détonation retentit. Le canon
les secrets de ce dangereux métier. Il inspecte le canon, crache flammes et fumée, et le projectile humain est
s’assure que rien ne cloche et s’installe au tableau de projeté vers le ciel. Au sommet de sa trajectoire, il
commandes. décrit un demi-saut périlleux et, deux secondes plus
Un roulement de tambour, et dans l’arène c’est main tard, atterrit sain et sauf sur le dos, dans le filet
disposé à l’autre extrémité de la
piste. Lorsqu’on donne le maxi
mum de puissance, l’homme-obus
atteint 30 mètres de haut et atterrit
à 60 mètres de son point de départ...
Comment se fait-il qu’un homme puisse survivre
à ce brutal et rapide passage dans l’âme d’un canon ?
En voici l’explication : il se déplace, en fait, à
l’intérieur d’un piston évidé, qui glisse jusqu’à la
bouche du canon et s’y arrête au moment où l’obus
humain est projeté en l’air. Ce piston, qui n’a que
40 centimètres de diamètre, est tout juste assez large
pour contenir un homme, mais c’est voulq, car ainsi
le « projectile » humain risque moins de se heurter
aux parois au moment de l’éjection.
Et il y a encore un autre secret. Le canon fonc-
l
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