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trouvent  la  mort.  Rompant  cette  lutte  inégale  et  sans  espoir,
          nos  F.T.P.  se  ïetirent  dans  les  forêts  et  les  rocher~  où  com-
          mence  une  de  ces  poursuites  homériques  que  tant  de  fois  ils
          connurent.  Mais  l'enn~mi  n'ose  pas  s'aventurer  trop  loin.
             A  Bernex,  cependant,  un  drame  atroce  se  déroule.  Au
          plus fort  de  la fusilléide,  5  maquisards,  Albert  Dantand,  Pier-
          rot  Long,  Pierre  Guérin,  Tino  Dai  Toso,  Pierre  Thomas,
          étaient  restés  bloqués  dans  leur  chalet.  Toute  retraite  leur
          étant coupée,  à  bout  de  munitions,  dans  la  barraque  en  flam-
          mes,  ils  sont  faits  prisonniers;  traînés  au  chef-lieu,  1 ls  vont
          connaître un  martyre sans  nom.  Torses nus  et  pieds  nus  dans
          la  neige,  les  r.inq  je1mes  héros  doivent  rester  plus  de  deux
          heures  les  bra-;  en  l'air  tandis  que  leur  sont  prrldignés  des
          coups  de  cro5se  et  de  baïonnette.  Les  boches  obligent  toute
          la  population e  les  enfants des  écoles  à  assister  à  ce  surpliœ
          infernal.  Le  curé  de  la  paroisse  qui  veut  s'interposer  est  cra-
          vaché.  Mais  les  F.T.P.F.  tiennent  bon,  pas  un  ne  parle.  L'un
          d'eux  a  les  verres  de  ses  lunettes  brisés,  et  enfoncés  dans  les
          yeux,  un  autre  les  orteils  écrasés,  les  côtes  enfoncées.  Un
          dernier  enfin  a  un  œil  complètement  arraché.  C'est  dans  cet
          état  que  les  Allemands  les  achèvent.
             A  signaler  que  les  boches  s'étaient  rendus  à  l'aube  à
          l'hôtel  tenu  par  notre  ami  Joseph  Buttey,  qui  servait  de  P.C.
          au  maquis.  (Joseph  Buttey  sera  arrêté  en  mai  1944,  torturé
          et  assassiné  par  les  boches.)  Grâce  au· sang-froid  de  sa  com-
          pagne,  tous  les  documents  importants,  les  titres  d'enrôlement
          et  les  archives  du  l"'  bataillon  peuvent  être  brûlés  au  nez  et
          à la barbe des tyrans.  Les armes et la  petite  réserve financière
          du  camp  « Mont-Blanc » sont  dissimulées  dans  une  brouette
          de  fumier  et  sorties des dépendances de l'hôtel pour  être mises
          en  sûreté.  Après  la  tragédie  de  Bernex,  les  groupes  F.T.P.F.
          se  retrouvent  et  se  rassemblent  à  Thollon.  Ils  reforment  im-
          médiatement  leur  camp  sous  le  commandement  de  Doudou
          Lamberti.  Mais  la  direction  F.T.P.  donne  l'ordre,  par  mesure
          de  sécurité,  et  prévoyant  le  pire,  de  dispersion  dans  les  fer-
          mes.  Nos  camarades  se  regroupent  toutes  les  fois  qu'il  sera
          nécessaire pour l'accomplissement de  leurs nouvelles missions.
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