Page 75 - Decrets mars
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            « M.  Ramel  fils  dit qu'il est  notaire  requis  par le  Père  Gar-
          dien  pour procéder  aussi à la  constatation  des  opérations  qui
          vonl avoir  lieu; qu'étant officier ministériel requis,  on  ne  peut
          l'entraver dans  l'exercice de  ses fonctions.
            «  Malgré sa qualité et sa  protestation,  1\1.  Ramel, notaire, est
          expulsé par la  force  sur  l'ordre  du  sous-préfet,  sous  le  se'.d
          prétexte qu'il  n'est pas muni  d'un  mandat du  Père gardien.
            Ses  deux  témoins  subissent le  même  sort.
            « Le sous-préfet dit ensuite qu'il  y a assez  de  portes  enfon-
          cées ; il  demande où  ~ont  les Pères,  et surtout le Père gardien.
          Il  lui est répondu : Cherchez-les.
            « Puis  se  ravisant,  il  demande  où  est  la  porte  intérieure,
          conduisant à  la  chapelle  du  couvent;  il  lui  est  fait  la  même
          réponse . Cherchez-la.  A lors i I se dirige,  accompagné du  lieu-
          tenant de gendarmerie,  dans  le  corridor  contigu  à la  chapelle;
         il ouvre une  porte et se  trouve  dans  le  chœur.  Le  lieutenant le
         suit.  Tous deux entrent,  têtes  couvertes,  traversent le  chœur,
         ouvrent  les  portes  très  élevées  de  la  table de  la  communion.
         Ils se  trouvent en  présence  d'une  foule  nombreuse de  femmes
         de  tous  rangs  et  qualités,  au  nombre  de  cent à cent  cinquante,
         récitant à l1aute  voix  les  prières du  chapelet.  A leur  vue,  l'ac-
         centuation des  prières  redouble  d'i □ tensité.
           «  Puis  tous  deux  signifient  au  peuple  assemblé  l'ordre de
         sortir  de  la  chapelle.  On  répond à celte  sommation  par  des
         cris de  résistance,  et le  tumulte  commence.  Se sentant impuis-
         sant à le  domiuer,  le sous-préfet retourne sur ses pas et appelle
         à son  aide  des  gendarmes et des  soldats,  qui  entrent  daus  la
         chapelle par la porte intérieure.  La  grande  porte d'entrée ou-
         vrant sur la  cour est ouverte.
           « Alors  commence  une  scène  indescriptible.  Les  cris,  les
         vociférations  augmentent sous  la  pression des  agents,  qui  veu-
         lent expulser les  femmes  agenouillées.  Celles-ci résistent,  pro-
         testent.  Toutes  portent  dans  leurs  mains des  fleurs,  des  bou-
         quets,  des  couronnes,  des  branches de  laurier. Elles  acclament
         les  Pères,  elles  crient  a11  sacrilège,  elles  protestent  contre  la
         violence et refusent  de  sortir.  Le  tumulte  dans  le  lieu  saint
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