Page 35 - Coeurs Vaillants Num 16
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LE CAMILLE FLAMMARION UN ADVERSAIRE DE TAILLE : LA R.A.F.
La marine,elleaussi.amaintenantsesavions. Uneflotte sans Bientôt l'Angleterre restera seule en guerre et, comprenant
protection aérienne ne sert plus à rien, car il faut protéger les tout de suite que l'aviation menace l'isolement d’une île, elle
convois contre les bombardiers ennemis et organiser la chasse travaillera à posséder une flotte aérienne puissante pour ripos
aux sous-marins qui menacent dans l’ombre des profondeurs ter aux attaques allemandes. La célèbre Royal Air Force n'était
la sécurité des plus gros navires. Quatre quadrimoteurs Far- que peu de chose au début : 550 chasseurs, dont les fameux
man construits pour Air-France ont été réquisitionnés pour Spitfire et les Hurricane, mais elle rattrapait le retard, sachant
l'Aéronavale et deux d'entre eux vont laisser leurs noms à la par ses agents que 2500 appareils ennemis n'attendaient qu'un
postérité. ordre pour fondre sur elle.
Le « Camille Flammarion », avec un équipage civil, piloté par Sir RobertWatson-Watt met alors au point un nouveau procé
Codos, va participer à la chasse au célèbre corsaire allemand dé électronique permettant de déceler au loin les avions de jour
« Admirai Graf Spee ». Multipliant les vols d'observation de comme de nuit et aussi par temps de brouillard. C'est le sys
très longues durées au-dessus de l'Atlantique, il finira par tème de radiolocalisation, que l'on appellera plus tard Radar. Ce
repérer l'ennemi fantôme qui attaquait sournoisement les n’est pas ici la place d'en expliquer le fonctionnement. Disons
convois entre le Canada et l’Angleterre. Grâce à ses rensei seulement qu’il utilise la réflexion des ondes sur un solide; il
gnements, le corsaire fut coulé. Le commandant regarda les envoie un rayon dans une direction ; s'il n'y a rien dans cette
opérations de sauvetage de son équipage, puis, en héritier des direction, il ne reçoit rien en retour; par contre, s'il lui revient
traditions de la grande marine, il choisit de périr avec son bâti un « écho », il peut savoir la distance où se trouve l'obstacle,
ment, forçant l'admiration de ses adversaires. connaissant la vitesse de propagation de l'onde. Signalant
toute attaque suffisamment à l'avance pour permettre aux chas
LE “ JULES VERNE " seurs anglais de prendre l'air sans qu'il soit besoin pour eux
Un autre de ces Farman, le Jules Verne, allait passer les de faire en permanence un barrage aérien, ce procédé se
bornes de la témérité. En juin 1940, les Allemands bombardent révéla très vite efficace et économique en hommes, en carbu
Paris ; la chasse française a riposté, mais n’a pu éviter que des rant et en avion. Plus tard les radars seront montés à bord des
bombes soient lancées sur des maisons d’habitation, des appareils eux-mêmes, ce qui leur permettra de trouver leur
usines, des édifices publics. Le moral de la population est ennemi au milieu des nuits les plus sombres et des brouillards
atteint. Il s'agit de montrer aux Allemands que leur aviation, les plus épais.
si forte soit-elle, ne les met pas à l'abri de représailles. La
décision est prise d'aller bombarder Berlin. Seuls les grands LE TEMPS DES BOMBARDEMENTS
Farman peuvent réussir cet exploit et c’est le «Jules Verne» qui Le 12 août 1940, 520 bombardiers se dirigent vers Londres,
est choisi. Le 7 juin il décolle, plein d’essence et de bombes, soutenus par 1270 chasseurs. Les Anglais se défendent éner
du terrain de Mérignac, près de Bordeaux. Pourquoi Bordeaux ? giquement, mais, en dépit de très lourdes pertes, les Allemands
C'est là que se trouve la seule piste suffisamment longue pour poursuivent et pilonnent, la capitale sans respect de la popu
permettre à un appareil aussi lourd de décoller. Le commandant lation civile. Les Dornier 17 et Junker 87 lâchent impitoya
Daillière est chef de bord. C'est un avion lent, moins de 300 kilo- blement leurs bombes... Durant quelques semaines, c'est
mètres à l’heure, mal armé, mais on n'a rien d'autre, alors il l'enfer. Puis les anglais ripostent à leur tour dans la nuit du
faut s'en contenter. A minuit, ils sont au-dessus de Berlin et 28 août en envoyant 80 Bristol-Blenheim et Vickers-Wellington
lâchent leurs bombes. Les Allemands, persuadés qu'aucun bombarder Berlin. Les Allemands sont fous de rage. Trouvant
Français n'oserait faire ça, l'ont bien repéré, mais ils ont cru trop dangereuses les attaques de jour, ils décident de détruire
que c’était un de leurs appareils égaré. Ce n'est qu'au dernier méthodiquement Londres la nuit, lâchant 50 000 bombes en
moment qu’ils comprennent, mais trop tard. Le but est atteint. quelques mois, qui tuèrent plus de 20 000 habitants, firent de
Les bombes font quelques dégâts, mais, surtout, la colère des nombreux blessés, démolirent 65000 maisons, atteignirent plus
Berlinois est grande de se voir ainsi bafoués. Profitant de la ou moins gravement deux millions d'autres. L'aviation venait de
nuit, le « Jules Verne » s'échappe à la barbe de la chasse alle montrer sa redoutable puissance, la Luftwaffe triomphait, la
mande et se pose intact le lendemain matin à Orly. Le voyage a pureté dü ciel était déjà à jamais souillée, et pourtant, on allait
duré près de quatorze heures. L’inviolabilité du ciel allemand en voir bien d'autres. ' (A suivre.)
n’est plus qu'une légende et bientôt les Anglais feront leur Jean-Paul BENOIT.
profit de cet enseignement.
Un chasseur allemand de la fin de la
guerre.
Les Allemands firent sur Londres une
série de raids de terreur pour démoraliser
la population.
C’est durant la guerre que les para
chutistes de combat firent leur apparition.