Page 96 - Au pays bleu
P. 96
Et dans son regard passait comme une petite flamme qm me
caressait. Tout de suite, nous fûmes amis.
Petite classe de ma jeune enfance, je revois encore tes
grands murs blancs aux fenêtres inaccessibles 2, tes tableaux
noirs auxquels je trouvais un air sévère, tes rangées de tables
vieilles et laides. Et comme tu serais triste dans mon souvenir,
si je ne replaçais, debout devant les élèves, avec sa .figure
souriante, avec ses manières gentilles, l'institutrice qui, heureu-
sement, te faisait oublier!
0 ! ma première institutrice, comme
vous saviez rendre simples les choses un
peu savantes que vous expliquiez ! Comme '
vous saviez me faire aimer ·vos petites
leçons, mes petits travaux! Comme vous
avez bien su être une autre maman!
Plus j'y pense, plus je sens que c'est
à vous que je dois d'avoir pris si tôt, et
d'avoir toujours conservé le goüt de l'école.
Quand le soir venait et que l'ombre
gagnait notre classe sans lampe, vous aviez
toujours quelque histoire jolie à raconter.
Vous ravissiez notre imagination, ou bien
3
vous l'effrayiez un tantinet parfois ...
Puis, quand sonnait la cloche et que,
d'un regard, vous nous aligniez tous sage-
4
ment, vous tapotiez les visages, en disant :
« Au revoir, à demain! »
Il vous arrivait même de vous baisser
et d'embrasser quelques-uns d'entre nous,
peut-être, de préférence, ceux que vous
aviez dû gronder clans la journée ...
Cette caresse-là, je l'ai eue, moi aussi,
- 97 -
AU PAYS BLEU.