Page 174 - Bouvet Jacques
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                       M.  Vernaz  et  ses  dénonciateurs
             L'abbé Vernaz François,  fils  de  Joseph, né  à  Chevenoz,
           te  27  mars  1759,  fit  ses  études  à  Evian,  sa  théologie  à
           Thonon,  sa  morale  à  Annecy,  et,  après  son ordination,  il
           fut nommé vicaire à Fessy.  Il refusa le serment, mais il ne
           put se résoudre à émigrer.  Il vint à Chevenoz, où la Muni-
           cipalité  le  favorisait,  parce  qu'il  se  mettait généreusement
           au service  des  âmes.
             Un jour, le nommé Châtillon,  patriote forcené,  habitant
           de Saint-Paul, le  fit prier de venir voir sa mère, dangereu-
           sement  malade.  On  représenta  au  prêtre  le  danger  qu'il
           .courait  de  tomber  dans  un  piège.  -  •  N'importe,  dit ii,
           fallO.t-U  être écartelé, je ne  refuserai  pas  mon  ministère  à
           un mourant. ;  Il  put donner à  cette malade tous les  soins
            religieux.  Non  seulement le  patriote ne chercha pas à lui
            nuire,mals encore il le remercia d'avoir ainsi assisté sa mère.
              Quelques  jours  après  (c'était le  20  février  1794), l'abbé
            Vernaz,  accompagné  de  M.  Tavernier,  se  hasarda  à  se
            transporter encore dans la même maison. Le terroriste, qui
            soupçonnait le  retour  du  prêtre  chez  lui  et  qui  regardait
           · le  sauf-conduit  comme  écoulé,  avait  pris  des  mesures  au
            district. Aussi eut-il, ce  jour-là, sous la main  deux soldats
            qui  montaient  en  détachement  à  Vacheresse,  Les  deux
            prêtres  furent  saisis,  enchaînés  et  conduits  dans  la  direc-
            tion  de  Vacheresse.  En  arrivant  au  Feu-Courbe,  M.  Ta-
            vernier,  d'un  coup  d'épaule,  terrasse  son  gardien  et  se
            jette par un épouvantable couloir, où il  fut suivi  de quel-
            ques balles qui ne l'atteignirent pas.
              L'autre prisonnier fut enchaîné et surveillé avec plus de
            précaution dans le  reste du  parcours.  Mais  c'était dans le
            pays même de M.  Vernaz, et, quand ces  fiers  montagnards
            surent leur prêtre et leur compatriote emmené cc,mme  un
            malfaiteur, ils  avalent bonne envie de le  délivrer; les  sol-
            dats eux-mêmes sentaient le danger de leur situation et ils
            étalent tout disposés  à  le  relâcher, sous  prétexte que  per-
            -sonnc  ne  voulait reconnaître le  détenu  pour  prêtre.  Mals,
             sur  ces  entrefaites,  un  certaih  Carlin  Maxit,  qui  revenait
            .de  Thonon  à  cheval,  apprit cette capture et l'irrésolution
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