Page 35 - Coeurs Vaillants Num 29
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— Ah ! mes fidèles amis, disait-il aux conseillers qui
l’accompagnaient, notre chère enfant, la princesse Perle de
Lune, nous cause bien du souci. Quand cessera-t-elle donc de
refuser tous les prétendants que nous lui présentons ; il est
grand temps qu’elle se marie et elle ne parvient pas à fixer
son choix ; que Boudha me pardonne, mais que lui ai-je fait
pour qu’il m’ait affligé d’une fille aussi capricieuse !
— Sire, nous lui avons pourtant fait connaître tous les
princes du voisinage, dit l’un des courtisans en s’inclinant
profondément.
— Je le sais bien, répondit le monarque, faisant de la
main un geste désabusé : l’un est trop grand, l’autre a le
nez trop long, celui-ci n’est pas assez riche, tel autre est
trop vieux. Cela ne peut plus durer, je vais la sommer
de choisir !
— Majesté reprit un chambellan, si vous lui faisiez boire
une infusion de racines de pivoines ? Il paraît que c’est sou
verain pour guérir l’humeur des filles.
— Fi, grogna l’autre, remède absurde, vous devriez.
Majesté, donner un grand bal, y inviter tous les prétendants
à la main de votre fille et la forcer à choisir parmi eux.
C’était au temps où le grand empereur de — Bien sûr, bien sûr, murmura le souverain pas très
Chine régnait sur le pays des cent mille convaincu, mais je n’aime pas ce procédé.
pagodes. Le jour venait à peine de se lever
et déjà le fils du ciel en personne arpentait,
l’air soucieux, les allées de marbre de son
merveilleux jardin.
Ils reprirent leur promenade en silence. A ce moment, la
princesse Perle de Lune s’avançait justement entre les
rosiers, suivie par un curieux compagnon ; c’était un oiseau,
un oiseau bleu, aux longues plumes veloutées, sautillant de