Page 34 - Coeurs Vaillants Num 19
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LE V2
                                                                                          Cette fois il s’agit de véritables fusées
                                                                                        stratosphériques. Le V2 n'a pas d’ailes, 1
                                                                                        mais un empennage en flèche, c'est un 1
                                                                                        cigare de 14,50 m de haut et 1,70 m de ]
                                                                                        large, dont la portée dépasse de 100 kilo-1
                                                                                        mètres celle du V1. Sa charge explosive, |
                                                                                        elle, n’est guère plus lourde : une tonne ।
                                                                                        et demie, par contre l’ensemble est beau­
                                                                                        coup plus conséquent : plusde13tonnes. 1
                                                                                        La propulsion se fait par combustion
                                                                                        d’oxygène liquide et d’alcool, et le tout I
                                                                                        décolle d'un petit chariot mobile impos­
                                                                                        sible à repérer par l'aviation comme la
                                                                                        grande rampe de 45mètres de long néces- ;
                                                                                        saire au V1. Radio-guidé du sol, le V2
                                                                                        pouvait à tout instant corriger sa direc- ;
                                                                                        tion, et d'ailleurs, comme il montait à '
                                                                                        plus de 100 kilomètres d'altitude pour
                                                                                        fondre sur son objectif à plus de 5500 ki­
                                                                                        lomètres à l'heure, il était impossible
                                                                                        de lui donner la chasse, on était averti
             Photo  U. O. C. F.                                                         explosé.
                                                                                        du danger une fois que la charge avait
                                                                                          Londres en reçut un grand nombre. '
                                                                                        Mis au point par le célèbre von Braun
                                                                                        à Peenemunde, le V2 fut construit en
                                                                                        grande série à raison de plus d'un mil­
                                                                                        lier par mois dans une usine souterraine
                                                                                        géante de Saxe, à Nordhausen. L’éta­
                                                                                        blissement, très moderne, employait
                  DES ENGINS NOUVEAUX              mètres à l'heure. Décollant d'une rampe   plus de 30 000 ouvriers et selon certains
                                                   de lancement sans que l’on pût modifier   témoignages 10 000 V2 y étaient stockés
               Avant d’abandonner l'histoire de l'avia­  sa direction en vol, la précision à 250 kilo­  en réserve lorsque les Alliés la décou­
             tion durant la dernière guerre on ne peut   mètres n'était pas excellente, mais   vrirent. Par chance la France fut épar­
              manquer de parler d’engins qui, pour   suffisante pour atteindre un grand centre.   gnée, mais la Belgique eut à pâtir de ces
              n'être pas des avions, tentèrent malgré   Du 14 juin 1944 au 27 mars 1945, des mil­  terribles engins lorsque l’Angleterre se
             tout, eux aussi, de posséder la maîtrise   liers de V1 s'abattirent sur l'Angleterre   troüva hors de leur portée.
              du ciel. Il s’agit tout d'abord des deux   causant de nombreuses victimes et
             terribles armes secrètes allemandes, les   d'immenses dégâts.                 COMME DES FLEURS DE
              V1 et les V2, puis de l’avion-fusée suicide   Par chance, les V1 ne volaient pas bien   CERISIERS
             japonais Ooka. Il convient enfin de dire   haut, ils n’allaient pas trop vite et les   Lorsque le Japon se sentit acculé à la
              un mot de l'apparition des premiers   chasseurs anglais, notamment les Spit-   défaite, l’amiral Takijiro Onishi, grand
              avions à réaction qui marquèrent un   fire, se spécialisèrent pour les descendre   patriote, eut l'idée des avions suicides
             tournant décisif de l’aéronautique, à tel   en vol. Repérés par les radars ils purent   Ooka, qui devaient être montés par les
              point qu'aujourd'hui parler d'appareils   aussi être détruits par la D. C. A. Enfin   célèbres volontaires Kamikaze. Il s’agis­
              à pistons c'est déjà parler d'appareils   les Anglais établirent tout autour de   sait d’anéantir la flotte américaine du
              démodés, ou tout au moins sans grand   Londres de véritables barrages de bal­  Pacifique en lançant contre ses princi­
              intérêt.                             lons captifs dans lesquels un certains   pales unités un essaim d'avions très '
                                                   nombre de V1 vinrent se perdre; il n'en   rapides, sans armement défensif, et qui,
                  LA BOMBE VOLANTE V1              reste pas moins que la capitale britan­  bourrés d’explosif, devaient aller per­
                                                   nique en reçut près de 2 500.        cuter les navires pour les couler.
               Dès le début de la guerre les savants
              allemands s'étaient mis à l'étude d'une        Une escadrille de chasse allemande s'apprête à décoller.
              arme capable de détruire les villes à
              grande distance. Une usine ultra-secrète
              avait été mise à leur disposition dans une
              des îles couvertes de pins et de sable de
              l'Allemagne du Nord, tout près du
              Danemark. L'emplacement était idéal,
              l’îlot de Peenemunde se trouvant dans
              une région absolument déserte dont nul
              ne pouvait trahir le secret. Des consignes
              d’une sévérité exceptionnelle étaient
              appliquées pour n’y laisser pénétrer per­
              sonne sans une autorisation donnée par
              Hitler lui-même.
               Le V1 fut le premier produit de cet
              antre démoniaque. C'était une sorte
              d’avion sans pilote pesant deux tonnes,
              dont la moitié était constituée par une
              bombe. Le moteur qu'il portait sur le dos
              était un pulsoréacteur d'une technique
             tout à fait nouvelle qui lui permettait de
              voler près d’une demi-heure à 640 kilo­
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