Page 5 - Coeurs Vaillants Num 04
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       LES TRÈS RICHES HEURES DU DUC DE BERRY                              LE CHEVALET DE MONET
       Au Moyen Age, la peinture proprement dite n’existait pas.   Au XIXe siècle apparaît une façon de peindre originale.
      Mais il existait les manuscrits. Les riches seigneurs faisaient   Jusqu'à Cette époque, les peintres ne peignaient qu'en atelier.
      appel, pour les illustrer, aux plus grands artistes du temps.   S'ils voulaient faire un paysage, ils le tiraient de leur imagina­
      Ainsi, vers l'an 1400, le duc de Berry fit-il venir Pol de Limbourg,   tion. L'idée ne leur serait pas venue de se servir d’un modèle,
      afin d'avoir le plus beau livre de prières qui soit au monde.   c'est-à-dire d'un paysage réel. Avec Monet et les artistes de
      Il fit également rechercher les vélins les plus précieux, les ors   cette époque, tout change. Le peintre part à la découverte.
      les plus purs, les couleurs les plus brillantes.        Il met son chevalet sur son dos, ses pinceaux et ses peintures
       Le travail dura des dizaines d’années. Telles qu’elles nous   dans sa boîte, et il arpente la campagne. Un paysage attire-t-il
      sont parvenues, les illustrations de ce manuscrit représentent   son attention? Il s'arrête et se met au travail. Il n'est plus
      un trésor inestimable. En dehors de leur valeur artistique,   question d'allégories académiques et de compositions
      elles représentent une documentation précieuse sur les cos­
      tumes, les usages, les paysages de ce temps. Les douze mois                                Suite page suivante.
      de l'année, avec leurs travaux et leurs joies, défilent devant
      nos yeux. Nous vous présentons l'illustration du mois de
      février, mois de la neige et du froid. Regardez-le bien. Les
      choses ont-elles beaucoup changé depuis six siècles?

                     BRUEGHEL LE VIEUX
       Sautons cent cinquante ans. Arrive un peintre flamand
      amoureux de la vie sous toutes ses formes. Avec lui appa­
      raissent des paysages minutieux, fourmillant de personnages
      et de détails. Regardez celui que nous vous présentons : les
      chasseurs.
       Le paysage est traité comme celui de la miniature. Il n'est
      pas peint pour lui-même. Les gens de cette époque n’étaient
      pas sensibles aux choses, mais aux hommes. Dans ce tableau,
      la colline du premier plan, le pont sur la rivière, les étangs
      gelés, tous ces détails ne sont pas montrés pour eux-mêmes,
      mais sont l’occasion de montrer les hommes et l’activité
      humaine : chasseurs, femmes portant du bois, patineurs,
      paysans conduisant une charrette. Nulle tristesse, nul abatte­
      ment. Toute cette animation, au contraire, respire la santé et
      la gaieté. En définitive, une joie de vivre bien flamande.

               L’HIVER DE NICOLAS POUSSIN
       Nous voici au grand siècle ; celui de Louis XIV. Un si grand
      siècle et un si grand roi ne peuvent s'accommoder que d'une        En haut, à gauche : l’hiver vu par Pol de Lim­
      peinture pompeuse. Au XVIIe siècle, les grands seigneurs de         bourg.
      la cour ne goûtent pas particulièrement la nature. Ils préfèrent   En bas, à gauche : l’hiver vu par Brueghel le
      les parquets cirés de Versailles à la pluie, la neige ou le soleil.   Vieux.
      Le peintre Nicolas Poussin, pourtant, a peint une série de         En bas, à droite : l'hiver vu par Poussin.
      quatre tableaux représentant les quatre saisons. Bien sûr,         En haut, à droite : l'hiver vu par Gauguin.
      son tableau n’a rien à voir avec l'hiver tel que nous le connais­  Au verso, en haut : l’hiver vu par Monet.
      sons. C'est un paysage purement imaginaire sur un sujet           Au verso, en bas : l’hiver vu par Utrillo.
      biblique : le déluge. L’hiver n’est qu'un prétexte pour faire un
      beau « morceau » de peinture. La nature entière semble en
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