Page 246 - Histoire de France essentielle
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Lectures. 238 — PÉRIODE CONTEMPORAINE.
uie Lecture. — M. Thiers au Corps législatif le jour '
de la déclaration de guerre.
Le courage civique est plus rare et aussi beau que le courage mili
taire. M. Thiérs en fit preuve le jour où il s’opposa à la déclaration de
guerre avec la Prusse. Le Corps législatif presque tout entier était
contre lui : on l’empêchait de parler. On l’appelait traître. Prussien,
vendu à l’étranger. Il resta cependant à la tribune et parla, parce qu’il
accomplissait son devoir en protestant contre une guerre inutile et
criminelle.
« Chacun de nous, Messieurs, dit-il, doit prendre la responsabilité
de ses actes. Quant à moi, je ne veux pas qu’on puisse dire que j’ai
pris la responsabilité de la guerre. Offensez-moi, insultez-moi. Je suis
prêt à tout subir pour défendre le sang de mes concitoyens que vous
allez verser si imprudemment. Si vous ne comprenez pas que je rem
plis en ce moment le devoir le plus pénible de ma vie, je vous plains
de tout mon cœur. La Chambre fera ce qu’elle voudra. Je m’attends à
ce qu’elle va faire. Mais pour ma part, je le déclare encore une fois, je
repousse une guerre aussi peu justifiée. »
La Chambre vota la guerre. Des bandes d’hommes payés par le Gou
vernement vinrent le soir même attaquer la maison de M. Thiers et
casser ses vitres. Il supporta tous ces outrages avec une constance
inaltérable. A peine un mois après la mémorable séance du i5 juillet,
les événements lui donnèrent raison. Les défaites succédèrent pour
nous aux défaites : Paris fut assiégé et l’on fut obligé de signer une
paix désastreuse. Mais les Français n’avaient pas oublié la noble con
duite de M. Thiers. Il fut élu député en 1871 dans vingt-huit départe
ments, et devint président de la République française. C’est en celte
qualité qu’il eut l’honneur et la joie de délivrer le territoire des en
nemis qui l’occupaient encore. Il est mort en 1877 : son œuvre n’a pas
péri avec lui. Il a fondé pour toujours la République dans notre pays.
(Ch. Normand.)
112e Lecture. — Causes de la guerre de Prusse.
Dépêche d’Ems.
L’entourage de Napoléon III, qui ne voyait pas sans regret le maître
s’engager dans la voie libérale, désirait ardemment qu’une guerre
extérieure vînt mettre un terme à celte situation, et lui permît de re
mettre la main sur son autorité despotique. Napoléon III, déjà malade
de l’affection organique qui devait l’emporter, physiquement usé et
moralement affaibli. 11e sut pas ou 11e voulut pas calmer ce parti bel
liqueux.

