Page 11 - Les chemins de terre Complet
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rançois DUCRET commença par manière de distraction à
• modeler des figurines dans des blocs de plâtre dont il décorait
les murs de sa cuisine. On y voyait paraît-il un gros chat à
l'affût de petits oiseaux.
Entre 25 et 30 ans, il se mit à un travail plus sérieux tout en continuant à
sculpter de petits objets, des chats. des chouettes, il entreprit de tailler la
pierre. A partir de 1840, il érigea un grand nombre d'oratoires et de statues
dans sa paroisse de Vailly et dans les environs.
Il ne fit aucun apprentissage et n'eut jamais la moindre notion des règles de
l'esthétique. Son art, tout spontané, n'eut d'autre guide qu'une certaine
adresse naturelle et une grande dévotion à notre Dame qu'il aurait voulu
faire belle comme il l'aimait.
Il n'avait d'ailleurs pour travailler que des moyens de fortune : quelques
gros ciseaux pour fendre les blocs de pierre, des ciseaux plats et à pointe
fine, une gouge et un marteau. Il avait forgé lui-même ses outils et quand
ils s'émoussaient, il savait leur donner une trempe spéciale nécessaire au
travail du gros marbre, noir ou gris, dont il se servait.
Pour polir sa pierre. il la frottait tout simplement avec de la molasse réduite
en poussière, ce travail demandait beaucoup de patience mais donnait de
bons résultats comme on le voit sur les dessins en relief et les rebords des
bénitiers de l'église de Vailly.
La plupart de ses madones sont inspirées de l'image de la médaille
miraculeuse, c'est l'immaculée étendant les mains ouvertes vers la terre ;
le choix de ces attitudes ainsi que les inscriptions : "Ô, Marie Immaculée
ou Ô, Marie conçue sans péché" est assez normal puisque le dogme de
l'immaculée conception fut défini en 1864.
Il choisissait habituellement comme modèle de ces figurines les beaux
traits de quelques femmes du village, souvent même le visage de sa femme.
Les oratoires de François DUCRET, comme tant d'autres, s'élèvent là où
l'on se réunissait le dimanche ou les soirs de mai pour réciter le chapelet
en commun.
A cet effet, chaque village tenait à avoir son oratoire, surtout ceux éloignés
de l'église. D'autres, "les pardons" étaient érigés en souvenir d'un mort.
On y trouve habituellement une courte prière d'indulgence.
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