Page 3 - les savoyards dans le monde
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De tous  temps,  le service militaire à  l’étranger fut  pour les
    cadets des familles nobles de Savoie l’occasion  de trouver
    l’aventure, un avancement plus rapide et parfois la fortune.
    Derrière  le  prince  Eugène,  figure  de  proue,  et  à  ne  retenir  que
    les  officiers  supérieurs,  il  faudrait  citer  des  centaines  de  noms
    au service de la France,  mais plus encore de l’Autriche, de la
    Bavière, de la Saxe, de la Prusse et même de la Pologne  et de
    la Russie. Dans cette marche vers «les Allemagnes» et l’Est européen,
    ces militaires retrouvaient les marchands savoyards parvenus à la
    notoriété dans les villes de l’Empire


    Parfois la Révolution, qui bouleversa  tant de destins, favorisa des
    réussites lointaines. C’est à elle que Xavier de Maistre dut de
    prendre rang parmi la haute aristocratie russe, autant par ses
    talents d’écrivain et de peintre que par son courage militaire.

    Même des roturiers d’origine  modeste parvinrent  quelques fois
    aux hauts grades; ayant réalisé une fortune éclatante, ils
    purent créer de nouvelles  dynasties nobiliaires  en Savoie. Ce
    fut  le  cas,  dans  des  aires  géographiques  très  différentes,  de
    Jean-Pierre Muffat-Saint-Amour, de Megève, et de Benoît Leborgne,
    devenu le général comte de Soigne, auréolé de son épopée indienne.


    A  mi-chemin  entre les savants et  les militaires, deux Savoyards
    se distinguèrent  dans le corps des ingénieurs  du roi sous
    l’Ancien Régime. Si Amédée-François Frézier, qui fut aussi explorateur
    et  théoricien de l’architecture, avait déjà fait  l’objet de
    plusieurs  études  dans  son pays  d’origine,  Claude  Masse, de
    Combloux, l’un des grands cartographes français, demeurait parfaite-
    ment inconnu en Savoie

    Dans le sillage  des ingénieurs  et architectes royaux, vo1c1
    qu’émerge,  grâce  à-des  travaux  récents,  la  figure  de  l’entrepreneur
    érudit et  dessinateur de grand talent, Jean Riondel, témoin
    d’une  autre forme originale  d’émigration,  celle  des tailleurs  de
    pierre  et  maçons  de  Samoëns  et  de  toute  la  vallée  du  Giffre.

    Avec la Révolution  et l’Empire,  la conscription,  le va-et-vient des
    armées et  les guerres se  ferment  les voies traditionnelles  de
    l’émigration  des colporteurs et des marchands.  Cependant, le
    développement  du Nouveau Monde et l’expansion coloniale
    des grandes  puissances  européennes  amènent  un véritable
    éclatement du mouvement  migratoire en direction des cinq
    continents, sous la pression d’une démographie  galopante. La
    réussite de Nicolas Girod, de Cluses, maire de la Nouvelle Orléans,
    et de Joseph  Avet, négociant  dans  la  même ville  et
    bienfaiteur de  Thônes, attira  de nombreux  émigrants du
    Faucigny et  du massif  des Bornes dans un pays neuf où tout
    semblait  possible

    Bref,  négociants,  explorateurs,  officiers  de  marine,  m1ss1onnaires,
    ou    simples    colons    essayant     d’adapter   un    savoir-faire
    séculaire  aux terres d’Algérie  comme  à la  pampa  argentine,  les
    Savoyards furent présents partout dans la découverte et la
    mise en  valeur des mondes nouveaux. Les grandes lignes de
    cette histoire sont connues  depuis longtemps, mais il reste
    encore beaucoup à découvrir, aussi bien en ce qui concerne
    les personnalités exceptionnelles  que  la masse des obscurs.
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