Page 103 - la_conduite_du_rucher
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AVRIL                   87
           Loque. — J’ai déjà ditquelques mots dans l’introduc­
         tion de ce fléau des ruchers. Les auteurs anciens nous
         apprennent que la loque a existé de tout temps1. Elle
         est due à l’introduction dans le tube digestif des abeil­
         les et des larves de certains organismes végétaux infi­
         niment petits, qui trouvant là un terrain propice s’y
         développent et s’y multiplient très rapidement. Les
         germes ou spores de ces microbes de la loque sont des
         poussières invisibles à l’œil nu, qui sont transportées
         par l’air et surtout colportées par les abeilles elles-
         mêmes, lorsqu’elles ont été en contact avec elles, soit
         dans une ruche loqueuse, soit au dehors dans son voisi­
         nage, où ces poussières peuvent s’être déposées. La
         loque n’est donc pas une maladie spontanée comme
         quelques personnes sont encore tentées de le croire ;
         elle est toujours due à des germes loqueux introduits
          dans la ruche. Diverses causes, telles qu’un refroidis­
         sement, une nourriture insuffisante ou de mauvaise
          qualité, peuvent amener la mort du couvain et sa
          décomposition, mais la pourriture spéciale qui caracté­
          rise la loque et qui est essentiellement contagieuse ne
          se déclare que si des spores de loque ont été appoitées
          du dehors.
            C’est donc de l’invasion de ces spores, ou de
          leur propagation si elles ont été introduites dans

            1. Aristote dit, après avoir décrit les ravages de la fausse-teigne :
         « Une seconde maladie est une sorte d’inertie qui tombe sur les abeilles;
          la ruche contracte une mauvaise odeur. » {Histoire des Abeilles,
          liv. IX). L’inertie est le propre des ruchées décimées par la loque ;
          il est probable que les Anciens, non plus que nos campagnards, ne
          visitaient pas souvent l’intérieur de leu;s ruches et qu’ils ne connais­
          saient la maladie qu’à l’inactivité des colonies et à leur mauvaise
          odeur.
            Délia Rocca, dans son Traité complet sur les Abeilles (Paris, 1590,
         vol. III, p. 227), décrit avec beaucoup de détails une péste* qui' a
         ravagé et détruit les ruches de l’îie de Syra, de 1555 à 1580, et qui
         n’était autre que la loque, bien qu’il ne lui donne que le nom de
         pourriture du couvain. Il cite l’abbé Tessier et Schirach qui ont
          décrit cette maladie avant lui.
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