Page 134 - Histoire de France essentielle
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Lectures.                 128 —         LES TEMPS MODERNES.


                            65e Lecture. — Le plan de Turgot.
                   Turgot, entrant au ministère, se mettant à sa table, à l’instant pré­
                 pare et écrit l’admirable ordonnance de septembre, noble, claire, élo­
                 quente. C’est la Marseillaise du blé. Donnée précisément la veille des
                 semailles, elle disait à peu près : « Semez, vous êtes sûrs de vendre.
                 Désormais vous vendrez partout. » Mot magique, dont la terre frémit.
                 La charrue prit l’essor, et les bœufs semblaient réveillés.
                   C’est là-dessus qu’avait compté Turgot, et plus encore que sur l’éco­
                 nomie. Si la culture doublait d’activité, si le blé, si le vin, roulant
                 d’un bout à l'autre du royaume, récompensaient leurs producteurs, la
                 richesse allait croître énormément. L’Etat était sauvé.
                   Ce n’était pas tout dans son plan. A la seconde année, Turgot dé-
                 chainait l’industrie, qui, libre tout à coup, allait décupler d’énergie,
                 de volonté, d’effort. L’ouvrier fainéant, languissant chez un maître,
                 allait, devenant maître, travailler nuit et jour. Heureux d’avoir à lui
                 son métier, son foyer, bientôt une famille, il n’enchérirait pas à plaisir,
                 donnerait à bon marché tant de choses nécessaires à tous.
                   A la troisième année, Turgot devait fonder l’instruction.
                   Donc, Culture affranchie (177a), Industrie affranchie (1776) et liaison
                 affranchie (1777). — Voilà.tout le plan de Turgot. (Michelet.)
                        66° Lecture. — Corporations industrielles.

                   La corporation, qui était une association ouverte au moyen âge,
                 était devenue une associalion fermée au XVIIIe siècle. 11 n’était même
                 pas toujours aisé d’entrer en apprentissage, car le nombre des apprentis
                 était restreint par les règlements.
                   Chaque corporation avait ses statuts ou règlements spéciaux qui
                 déterminaient strictement la nature du travail et les détails de fabri­
                 cation de chaque objet. Une jurande, composée de maîtres ou jurés,
                 élus par leurs confrères, veillait à l’exécution de ces règlements.
                   Les corporations étaient nombreuses; chacune d’elles avait son do­
                 maine délimité, qu’elle défendait avec jalousie contre les empiétements
                 des corporations voisines; delà, de nombreux et interminables procès,
                 comme celui des tailleurs et des fripiers. Les tailleurs voulaient fixer
                 la quantité de drap neuf qui pouvait entrer dans un vieil habit, et les
                 fripiers contestaient aux tailleurs le droit de réparer un habit qui
                 avait été porté, ne fùt-ce que pour en changer les boutons.
                   Cette organisation de l’industrie et du commerce supprimait la con­
                 currence et par conséquent le progrès; elle favorisait un petit nombre
                 d’intéressés au détriment de la grande masse des travailleurs et des
                 consommateurs.                    . (Choublier.)
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